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Essai du jour
Des choses que nous ne savons pas faire, nous commençons par essayer de les faire. Seulement, on ne fait pas semblant : ce qui s’appelle vraiment essayer. Essayer, c’est de l’ordre de la tentative, c’est se risquer à l’échec, c’est vivre l’échec, c’est corriger les défauts, petits à petit, répétition après répétition. Avec une idée : la répétition se pose comme motrice.
Dans le domaine de la philosophie scolaire, il y une sorte de cohorte de problèmes attenant notamment, au type d’exercice imposé par l’état, les ministères. Là encore, une sorte de principe de répétition, la pratique de l’essai, se posent. En principe, un élève essaie de pratiquer la dissertation. En principe, bien sûr, mais en fait, je ne sais pas trop. Je ne sais pas trop si vraiment les élèves s’essaient à rédiger des dissertations : qu’ils s’essaient à la rencontre de l’échec, à l’identification des causes de l’échec, comme dans tout bon sport, tout bon art, toute bonne musique, toute bonne activité en général.
Aux élèves j’aurais envie de leur dire : « essayez déjà, et si vous n’y arrivez pas, essayez, avec l’aide de votre professeur, d’identifier exactement ce qui fait que votre copie n’a pas encore la moyenne ». Il apparaît que certes, l’élève s’essaie à écrire, mais que le professeur s’essaie à faire essayer d’écrire. Le professeur qui n’y arrive pas, à ce moment-là, essaie à son tour, épaulé de ses confrères, de comprendre ce qui fait que son essai de faire essayer les élève est difficile à se réaliser concrètement. Autrement dit : on rate, on rate tous, élèves, professeurs, et responsables en tous genres. Seulement, on ne se résigne pas, on étudie les données du problème : notamment le problème de la transmission des savoir-faire propres à la discipline (philosophique, ou autre).
Qu’essayé-je, ici, de me dire ? Je m’y reprends, pour étudier les problèmes afférents à l’essai, la tentative, la répétition, dans le cadre qu’est celui de l’enseignement de la philosophie en particulier, mais qui se retrouve dans toutes sortes de domaines. Je m’essaie à chercher plus précisément à savoir de ce qu’il en est de l’essai. Et je le fais.
Essai, exercice. Soit la prescription : écrivez une dissertation. Autrement dit : effectuez toutes les étapes nécessaires à la production d’une dissertation, d’une vraie dissertation, ou d’une explication de texte. Mais connaissez-vous seulement chacune des étapes : sauriez--vous les expliquer une à une, pas à pas ?
Concrètement : il faut rappeler que les élèves, puisque l’épreuve dure quatre heure, devraient apprendre à rester au moins quatre heures en place, et, dans un premier temps, à produire quelque chose dans ce laps de temps. En principe il faudrait que chaque élève s’y essaie. Et pas seulement une fois, mais le nombre de fois qu’il faudra : comme pour le permis de conduire. Il y aurait alors à mettre en place une réflexion à mener à propos de ce qui fait que, effectivement, la plupart des élèves ne franchissent déjà pas ce pas. Un élève s’est-il ou a-t-il su passer seul, chez lui, quatre heure à produire un premier travail, quel que soit l’état du travail et les défauts qu’il contient. Si on faisait une sorte de sondage, je pense qu’une très grande majorité d’élèves n’a pas essayé d’habiter ce laps de temps, n’a pas vraiment cherché à écrire le temps qu’il faudrait, pour être vraiment prêt, le moment venu, le temps de l’épreuve.
Observation : la philosophie en lycée se déroule sur une durée de quatre heures (ou plus ou moins). Or, il pourrait s’avérer qu’une grande majorité des lycéen n’a jamais essayé de se confronter à l’expérience d’être assis un laps de temps, à ne rien faire d’autre que d’écrire et, faire ce qu’il peut.
Il aurait fallu qu’il s’y essaie, encore et encore. Et non pas avoir fait semblant d’essayer.
On pourrait alors présenter aux élève l’épreuve de la dissertation comme une expérience, et d’ailleurs c’est cela : disserter, certes c’est produire une sorte de réflexion, mais c’est aussi une expérience à faire et, qui peut, s’avérer tout à fait attrayante : là, il faudrait faire tomber les préjugés qui font penser qu’écrire et rester assis est « chiant ». Un modèle sportif pourrait alors nous aider : parce que le sport, lui aussi, est affaire d’expérience.
J’essaie de me dire ce que je pourrais dire si j’étais professeur actuellement : « vous allez vous préparer à faire une expérience. Une expérience qui se présente concrètement sur une durée de quatre heures, durée au cours de laquelle vous allez devoir réaliser un certain nombre de choses, restant assis à votre table (sans téléphone, sans ordinateur). Vous allez aussi être amenés à devoir savoir réaliser un certain nombre d’opérations : vous devrez savoir réaliser chacune des opérations nécessaire à la bonne rédaction du devoir. Qui dit « rédaction » dit : prendre la plume. Et si vous ne savez pas encore écrire à la main, c’est l’occasion de le faire. En effet, voici que, maintenant, il y a de plus en plus d’élèves ayant des difficulté non seulement à parler la langue, mais aussi à rédiger quelques mots).
Autre suggestion : approximativement, et d’une certaine manière, il faudrait susciter chez les élèves, (est-ce notre rôle ?) non seulement l’envie, mais aussi un certain type d’attitude d’ordre « volontariste ». Qu’ils deviennent volontaires ou actifs dans leur démarche d’apprentissage : que les heures passés au lycée ne se réduisent pas à une attente d’un an où nous aurions passé un an à attendre que le bac passe en vue d’oublier une sorte d’année d’ennui. Analyser aussi ce qui cause l’ennui.
Analyser aussi, en général, les causes du découragement : sachant aussi qu’il fait partie du jeu. A un moment, il est quasi nécessaire de rencontrer, et vivre cette expérience (est-ce qu’il faut l’encadrer ?).
Il faudrait alors limiter ennui, et découragement. Nos cours devraient ne pas être trop soporifiques, ni trop « abstraits » ou trop déconnectés…